Deuxième adaptation du manga de Kazumasa Hirai (après une production Toho en 1973), ce Wolf Guy échappé des studios de la Toei est un de ces objets pop dont le Japon a le secret, une arme de distraction massive s'aventurant aux confins du politiquement correct histoire de réveiller quelques rires francs et enfantins. Où l'innocence refleurit sur le tas de fumier des turpitudes adultes.

Mais dénonçons pour commencer la demi-arnaque : point de transformation monstrueusement velu au cours du métrage, le lycanthrope en titre ne voit se réveiller à la faveur du cycle lunaire qu'une force prodigieuse et un don de régénération wolverinien. Mais qu'importe les promesses fallacieuses (puisque cela fait souvent aussi partie du jeu de ce genre de productions issues de l'exploitation la plus crasse), la bestialité s'avère malgré tout au rendez-vous puisque notre créature fantastique est incarnée par Sonny Chiba, icône du faux cool qui se sera rêvé en Steve Mc Queen du soleil levant (on s'amuse d'ailleurs ici d'un poster du Mac négligemment accroché sur le mur d'une ruelle dans une scène de bagarre) mais a toujours eu du mal à faire taire sa violence instinctive. Il faut le voir ainsi, au cours de plusieurs scènes, faire son entrée dans une pièce et jouer du poing (et de la savate) avant de décrocher le moindre mot.


Un caractère volcanique qui ne se verra dompter (et sauver) que par des femmes, entre James Bond girls traîtresses à leur mauvaise cause et figures œdipiennes consommées, toutes sacrificielles. Là réside le principal attrait tordu de ce Wolf Guy : son traitement complètement décomplexé de la sexualité. Deux scènes sont à noter : la première voit une femme lécher du sang sur les doigts de notre héros lunaire puis implorer l'animal qui sommeille en lui.

La seconde ose un rapprochement en montage alterné entre le sein d'une nouvelle conquête et celui de la mère de Wolf Guy ! Et un rire éclatant en gorge du spectateur devant l'audace franchement culottée du cut, réplique sulfureuse ("tu es ma femme. Tu es ma mère.") à la clé. Même si l'on s'est habitué ici, avec le temps, à ce genre de saillies grotesques typiquement nippones, avouons que celle-ci précisément est franchement savoureuse.



Mais comme souvent dans ces productions délirantes, difficile de réduire la femme à un simple objet sexuel malgré l'apparente misogynie et le sadisme de l'ensemble. Comme précisé précédemment, notre héros lupin se voit littéralement mener par le bout de la queue et c'est bien la gente féminine qui, seule, le précipite dans un périple hautement périlleux et l'extirpe des impasses aux violences dans lesquelles il s'échoue. Pour preuve ce climax final entre femmes désespérées, au nihilisme si typique de l'exploitation japonaise.


Alors certes, Kazuhiko Yamaguchi (Sister Street Fighter et Wandering Ginza Butterfly, entre autres) n'est pas le réalisateur le plus flamboyant du pays et Wolf Guy ne possède pas la technicité virtuose (et signifiante) de la moindre pellicule d'un Norifumi Suzuki. Mais si l'on sait mettre de côté les plans tremblotants d'opérateurs parkinsoniens, son découpage s'avère plus dynamique et créatif que d'habitude. C'est sans doute dû à un script franchement rocambolesque, l'obligeant à enchaîner les séquences pied au plancher. Car pas moins de trois films cohabitent dans Wolf Guy.

Commencé ainsi en polar fantastique à l'ambiance crépusculaire où se croisent industrie du rock local, politiciens conservateurs véreux, drogue et viol collectif, le film dérive en cours de route vers la James Bonderie dépravée (avec organisation secrète et base idoine à la clé) avant de s'achever dans un trip naturaliste pas si éloigné des Baby Cart (dont le titre original est, rappelons-le, Kozure Ōkami, soit "le loup qui accompagne son petit"). Un récit, donc, tout en ruptures de ton et seulement tenu par l'intensité naturel de Sonny Chiba et la nécessaire acceptation du spectateur de certaines règles bafouées et piétinées dans une joie certaine : celles du bon goût et de la bienséance.

On avoue volontiers avoir ici quelques difficultés à refuser ce genre de plaisirs.

Le film disponible en VOSTFR sur l'admirable UFSF, c'est ICI.



Dimanche 23 avril 2017 - carnet de bord du capitaine.

Pas facile de garder un semblant de joie de vivre dans le marasme actuel, malgré les élans solaires qui viennent darder notre peau tanée par les vents cosmiques. L'autostoppeur de l'infini poursuit sa route dans l'adversité crasse des turpitudes terrestres, le regard (et les conduits auditifs) toujours tourné vers un horizon loin de la gravité des évènements.  Ce qui ne veut pas dire que nous sommes déconnectés du théâtre humain, non, plutôt détachés de ces élans réactionnaires qui vouent aux gémonies la moindre tentative de recul. La tête dans le guidon de mon incertitude, je fonce. Oh ma Gazoline, sens-tu venir le looping?

Un petit arrêt au restaurant avant la fin du monde.

Deuxième adaptation du manga de Kazumasa Hirai (après une production Toho en 1973), ce Wolf Guy échappé des studios de la Toei est un de ces objets pop dont le Japon a le secret, une arme de distraction massive s'aventurant aux confins du politiquement correct histoire de réveiller quelques rires francs et enfantins. Où l'innocence refleurit sur le tas de fumier des turpitudes adultes.

Le roi Kong est de retour avec une pure série B d'aventure fantasy qui expose à chacun de ses photogrammes ses limites, mais réussit pourtant à conserver quelques charmes. Charmes qui vaut bien un article ici-même, le blog ayant une affection particulière pour ce gros mythe poilu survivant à chaque fois aux mauvais traitements qu'il subit, que ce soit face caméra comme en coulisses.

En célébration du renouveau printanier, double ration de son pour les esgourdes curieuses. Au programme de ce double bill, un nouvel épisode de l'autostoppeur de l'infini, Hitchhike to a bigger world, escapade foncièrement aventureuse aux confins de mondes étranges, et Tutti i colori del nuovo disco, sélection, choisie dans la plus grande décontraction, de ce qui nous fait danser gaiement par ici.

Hitchhike to a bigger world, pour commencer.

Nous évoquions précédemment le tournage de Qu'est-il arrivé à Baby Jane ? comme un acte fondateur. L'expression est sans nul doute grandiloquente mais pas sans fondement. Le fondement d'une fronde qui mènera au Nouvel Hollywood des années 70, l'acte qui cristallise les luttes intestines entre cadres hollywoodiens : acteurs, réalisateurs et producteurs, tous à s'écharper sur le même bûcher, mais pas pour les mêmes raisons (si ce n'est certaines vanités partagées).

La nouvelle création de Ryan Murphy n'allait évidemment pas échapper à nos radars, ayant par ici suffisamment louer les vertus d'American Horror Story et de Scream Queens (au passage, deuxième saison sublime – et malheureusement probablement dernière, tant le show satirique est incompris, mais nous y reviendrons prochainement). Feud, donc. Querelle, in french.

Apnée est le premier long métrage des Chiens de Navarre, pour faire court. Les Chiens de Navarre, c'est au commencement, sur scène (the world is a stage), une troupe libertaire et explosive, prosélytes du spectacle qui explose à la gueule du spectateur en grenade dégoupillée farceuse. Mais si le théâtre, c'est du cinéma (pour rester dans l'image), le cinéma, ce n'est pas forcément du théâtre.

Triste anniversaire s'il en est, celui du jour où l'enfer se déchainait sur terre, plus précisément sur les côtes japonaises, en enchainement catastrophique. Tout commença le 11 mars 2011 par un tremblement de terre, d'une magnitude 9,0, survenu au large des côtes nord-est de l'île de Honshū. Cela se poursuivit par un tsunami dont les vagues atteignèrent une hauteur estimée à plus de 30 mètres par endroits.

S'il est un réalisateur qui sait, à partir du découpage simple et lisible d'une scène de quotidien ordinaire, distiller une angoisse sourde, c'est bien Kiyoshi Kurosawa. Son récent Creepy, conte cruel de dé-inviduation où un ogre moderne vient manipuler et détruire des cellules familiales de l'intérieur, fourmille de ces instants saisissant le spectateur à la gorge par surprise, sans pour autant jouer d'artifices spectaculaires. Exemple avec une courte scène de repas complètement anxiogène.

Avec un peu de retard, on vous livre les nouvelles aventures de l'auto-stoppeur de l'infini, direction cette fois un système planétaire qui aura fait l'actualité terrestre ces dernières semaines, Trappist-1.
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